Une citation pour les curieux :

« Garnier se demandait si ce n’était pas là le comble de l’arrogance : se comporter comme un saint dans un monde de loups. Parce qu’il se comportait comme un saint, ce con. Sa sainteté était une gifle pour tous les autres. » (Vivonne, La Table Ronde, 2021)

Citadins de demain, Capitale du nord . 1, Cycle de La Tour de garde, de Claire Duvivier, Aux forges du Vulcain (2021)

 
Grand format - 384 pages - 20 euros 
Paru le 8 octobre 2021 
EAN : 9782373051018

Quatrième de couverture 

Amalia Van Esqwill est une jeune aristocrate de Dehaven, issue d’une puissante famille : son père possède une compagnie commerciale et sa mère tient un siège au Haut Conseil. Progressistes, ils lui ont offert, à elle et à d’autres enfants de la Citadelle, une instruction basée sur les sciences et les humanités. Jusqu’au jour où le fiancé d’Amalia se met en tête de reproduire un sortilège ancien dont il a appris l’existence dans un livre. Au moment précis où la tension accumulée dans les Faubourgs explose et où une guerre semble prête à éclater dans les colonies d’outre-mer, la magie refait son apparition dans la ville si rationnelle de Dehaven. Et malgré toute son éducation, Amalia ne pourra rien pour empêcher le sort de frapper sa famille et ses amis.

Ma chronique 💛

Parlons enfin de Citadins de demain, par lequel Claire Duvivier nous fait le plaisir de poursuivre sur sa lancée chez nos amis des Forges. Ce récit est celui d'Amalia Van Esqwill, jeune fille issue de l'aristocratie de Dehaven, fameuse capitale du nord dont le nom avait déjà été révélé par Guillaume Chamanadjian dans Le sang de la cité. Avec ce nouveau tome du cycle de La Tour de garde vient enfin un premier aperçu des liens qu'entretiennent les deux trilogies.

Dans la cité de Dehaven, deux puissantes familles ont entrepris d'élever leurs enfants ensemble en leur faisant suivre une éducation très complète, avec pour objectif de former... les citadins de demain. L'intérêt du regard d'Amalia, très lucide sur les avantages et les inconvénients d'une telle entreprise, est de voir comment les évènements vont la conduire à en découvrir les limites et les zones d'ombre, à apprendre de quelle façon elle peut en tirer parti et à découvrir par elle-même comment elle va gérer les imprévus.

J'ai retrouvé avec plaisir ce qui avait fait le charme de Un long voyage, dans lequel le narrateur nous faisait témoins du basculement d'une vie promise à une grande destinée et dont le chemin était tracé d'avance. Il existe ainsi de grandes similitudes entre Malvine et Amalia, deux femmes intelligentes, capables, compétentes et déterminées, confrontées à des évènements qui les dépassent. Le récit, une fois encore, prend son temps et égraine lentement les prémices d'un changement irrésistible, soutenant la même idée qu'auparavant : rien ne peut arrêter la marche de l'Histoire et, même si on en détecte certains indices, il faudra se préparer à un basculement que rien ne peut empêcher. Rien n'est acquis pour les protagonistes de cette histoire, et il faut croire que Claire Duvivier adore pulvériser leur petit train-train quotidien à grands coups de pompe.

Comme Un long voyage, donc, ce récit est d'abord tranquille. Une eau qui dort avant que tout ne commence à déraper sérieusement. Amalia doit composer avec une situation économico-politique de plus en plus perturbée, mais aussi avec les décisions et les choix de ses camarades. Le cours de cette histoire s'emballe dans le dernier tiers, façon Claire Duvivier, qui fait mine de laisser son lecteur avec un vague sentiment que la situation est plus ou moins maîtrisée avant de le pulvériser, lui aussi, à grands coups de pompe. Le cliff hanger couronnant la fin — que j'ai pour ma part beaucoup apprécié — nous remet à notre place sur ce point, penauds.

À nouveau, l'autrice propose des personnages intéressants à défaut d'être attachants. C'est chez elle une particularité que j'apprécie, d'être capable de délivrer une histoire captivante sans faire appel aux émotions du lecteur. C'est aussi ce qui participe de l'installation insidieuse des évènements par lesquels tout va basculer sans que l'on puisse réellement prévoir quel domino tombe en premier. 

Un mot sur la cité de Dehaven, dont la présence se fait beaucoup moins, disons, organique que chez Guillaume Chamanadjian. Chez ce dernier, Gemina se trouve réellement incarnée, presque vivante, dans des descriptions qui font d'elle un personnage à part entière du récit ; cette cité-là se vit, se respire, se sent et se meut, dans un ailleurs par si lointain et presque palpable auquel Nohamux se frotte de temps à autre. Dehaven est quant à elle une présence mystérieuse, pour l'instant inerte et figée dans un temps dont on ignore encore tout ; elle se dissimule dans une inquiétante discrétion en filigrane des découvertes faites par les protagonistes

Les liens entre capitale du nord et capitale du sud sont pour l'instant ténus, mais existent bel et bien. Il y a le jeu de la tour de garde, bien sûr, dont les origines se dévoilent ici timidement — juste de quoi attiser la curiosité — mais aussi et surtout un évènement en commun dont on ne sait pas encore toutes les conséquences.

En bref, Citadins de demain confirme les qualités et la plume élégante de l'autrice au style si particulier qu'est Claire Duvivier. C'est pour ma part et sans surprise un coup de cœur. Ceux qui l'ont déjà lue et appréciée ne pourront qu'être séduits. Que ceux qui ne la connaissent pas encore se jettent à l'eau sans attendre !



Commentaires

Enregistrer un commentaire

Votre mot doux...