Quatrième de couverture
« Nous avions passé la journée seuls, à
caresser les fleurs, et nous rêvions encore de solitude le soir venu. Je
n’avais qu’une idée en tête, rentrer, vite, me mettre au chaud avant
que le froid n’empire. On avait su trafiquer l’or jaune pour qu’il
résiste à tout, au vent, aux gelées nocturnes, au crachin triste des
jours gris. On n’avait pas jugé utile de nous trafiquer nous, petits
porteurs transis de froid et de chagrin, jusqu’au bout. »
Un futur
sans abeilles, étouffé dans la grisaille de gigantesques latifundia. Un
futur où l’humanité se meurt, privée de descendance. Albert, journalier
agricole, répand le pollen à la main. Manon, sa compagne engagée à
l’usine, sombre peu à peu dans la folie. Et dans la morosité du
quotidien, une lueur, Apolline.
On ne sort pas indemne de ce roman majeur. Joëlle Wintrebert, auteure de Pollen.
Un écrivain à suivre. Lloyd Chéry, Le Point Pop.
Dernières
fleurs avant la fin du monde finit par s’inscrire dans le registre des
romans poétiques et douloureux que l’on referme avec un pincement au
cœur, le temps d’une partition saccagée et d’une floraison imprévue. Nicolas Winter, Bifrost.
Ma chronique
Nicolas Cartelet dépeint un monde en grande partie effondré, gris, triste et confiné à la misère, dans lequel l'humanité en est réduite à polliniser les plantations à la main. Henri, le narrateur, n'a qu'un souvenir lointain du monde d'avant, avant que lui ne sombre dans l'impuissance, sa femme dans la dépression et que leurs vies se résument à l'usine ou aux plantations, avec pour salaire une poignée de patates à manger le soir. Difficile de ne pas voir dans ce pessimisme un des avenirs plausibles d'une humanité malade et agonisante de ses erreurs.
La lumière de Henri, c'est Apolline, une jeune femme autiste en qui son père continue de placer de vaines ambitions. Apolline, à qui il lui est demandé de faire l'apprentissage de la lecture, devient un rayon de lumière dans sa vie, incarne malgré elle un renouveau de désir, d'espoir et de foi en l'avenir. Leurs interactions sont le prétexte de certains des plus beaux passages du récit. Son innocence et son insouciance le sauvent, au cœur d'un système sur le point de s'effondrer une seconde fois avec la révolution qui gronde dans les plantations Est.
Qu'on ne s'y trompe pas, le monde décrit par l'auteur est sombre et mourant, et le regain de vie de son narrateur au travers de la jeune Apolline, dérisoire. Le fil de ses pensées, tel qu'il est exposé, évoque celui d'un Winston Smith (1984) ou d'un Guy Montag (Fahrenheit 451), notamment dans la façon dont il interroge le système dans lequel il vit et finit par se rebeller. Rien n'est dit, pour finir, sur ce que devient Manon, que Henri abandonne lâchement à son sort. Nicolas Cartelet restitue bien, ici, les humeurs changeantes de son protagoniste : tantôt lucide sur sa part de responsabilité dans l'effondrement psychologique de son épouse, tantôt cruel dans ce qu'il dit penser d'elle. Peut-être tente-t-il de sauver l'éclat d'Apolline, qui n'a pas encore été terni par ce qu'est devenu le monde, ou peut-être de se racheter une conscience ? Ses choix et son comportement sont laissés au jugement du lecteur.
Si la fin est mignonne, elle laisse trop de questions en suspend pour être joyeuse, malgré ses apparences de légèreté. Ce récit laisse en tout cas de quoi méditer sur ce que devient notre monde, et sur ce que nous devenons avec lui.
Ton dernier paragraphe me refroidit : je ne suis pas sûr d'avoir envie d'une fin "mignonne" à ce type de roman. Je crois que je vais passer.
RépondreSupprimerOn m'a souvent reproché d'utiliser ce mot, haha...
SupprimerJ’avais lu du même auteur Petit Blanc,c’est bien écrit, un conte émouvant.
RépondreSupprimerJ’avais bien aimé Dernières fleurs ...mais je suis restée sur ma faim au final.
Sinon l’auteur écrit bien.
J'ai eu un peu le même sentiment. :)
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