Une citation pour les curieux :

« Garnier se demandait si ce n’était pas là le comble de l’arrogance : se comporter comme un saint dans un monde de loups. Parce qu’il se comportait comme un saint, ce con. Sa sainteté était une gifle pour tous les autres. » (Vivonne, La Table Ronde, 2021)

Les miracles du bazar Namiya, de Keigo Higashino, chez Actes Sud (2020)

La quatrième de couverture

En 2012, après avoir commis un méfait, trois jeunes délinquants se réfugient dans une vieille boutique abandonnée pour s’y cacher jusqu’au lendemain. Dans le courant de la nuit, quelqu’un glisse une lettre par la fente du rideau métallique. Lorsqu’ils l’ouvrent, les trois compères découvrent qu’elle contient une requête adressée à l’ancien propriétaire, qui s’était taillé une petite notoriété dans le quartier en prodiguant des conseils de toutes sortes à ceux qui lui écrivaient. Mais la lettre a été écrite… trente-deux ans auparavant. Ils décident de répondre à cette mystérieuse demande de conseil et déposent leur missive dans la boîte à lait à l’arrière de la boutique, comme l’ancien tenancier avait coutume de le faire. Aussitôt, une nouvelle lettre tombe par la fente du rideau métallique, elle aussi venue du passé… L’espace d’une nuit, d’un voyage dans le temps, les trois garçons vont infléchir le cours de plusieurs destinées, sans se douter qu’ils vont peut-être aussi bouleverser la leur.

Admiré pour la mécanique parfaite de ses intrigues policières, Keigo Higashino fait une incursion dans le fantastique et réussit un petit miracle de roman, touchant et profondément humaniste.

Ma chronique 

  * Cette chronique est estampillée #DéfiCortex *

En début d'année, cet ouvrage au titre merveilleux et à la couverture pleine de charme en a séduit et convaincu plus d'un. Encensé en règle générale, un certain nombre d'entre vous m'en ont conseillé la lecture.

On peut se demander ce qui a pu pousser un auteur reconnu dans le polar à se tourner vers le fantastique, et surtout s'étonner du résultat : une belle histoire mettant en scène des destins entrecroisés et décrivant la façon dont ils s'influencent les uns les autres. Bonté et bienveillance dominent un récit qui comporte pourtant sa dose de drames, et le tout s'achève sur une jolie conclusion pleine de vertu. C'est gentil, tranquille, agréable à suivre. Seulement voilà, je ne partage pas l'engouement.

Indéniablement, le point fort du récit est la conception de sa trame par l'auteur : Higashino mêle très habilement les différents parcours de vie, dans un enchainement totalement maitrisé, suivi sans accroc par le lecteur (l'expérience du polar ?). Il tient également une réflexion intéressante sur la portée et les conséquences de nos actes, notamment lorsque nous essayons d'aider quelqu'un, et plaide, à sa façon, pour plus de bienveillance et de rapports désintéressés entre les individus.

Reste que son histoire n'a pas su me toucher. Une sorte de barrière culturelle, d'abord : les japonais ont une conception des relations sociales très particulière, et concrètement, ça donne des scènes ou des phrases qui me font un peu trop souvent lever les yeux au ciel. J'imagine d'ailleurs sans peine l'effet qu'ont pu provoquer les réponses quelque peu abruptes des trois jeunes cambrioleurs sur un public japonais, pour le moins étranger à l'idée d'une franchise sans fard. La traduction, ensuite, en ce que le choix de certaines formules m'a rendue perplexe plus d'une fois, parce que inhabituelles pour le français. J'ai cru deviner, notamment dans les questions, une traduction de ce qu'expriment les particules d'emphase en fin de phrase, mais dont la retranscription en français donne des formules peu naturelles. Plus rarement, les rendus sont hasardeux. Cet aspect s'est avéré un peu déroutant pour moi, sans que je puisse savoir s'il s'agit d'un choix délibéré ou si ce rendu est fidèle au style de l'auteur : c'est donc à l'appréciation de chacun. Enfin, je n'ai réussi à éprouver aucun attachement pour les différents protagonistes à l'exception du vieux propriétaire du bazar, et que peu d'empathie pour les choix auxquels ils faisaient face.

Je suis un peu déçue de n'avoir pas su, pas pu être séduite par ce récit, d'être passée à côté. Mais ce sont des choses qui arrivent. N'hésitez pas à soulever des éléments qui vous ont semblé importants et que vous auriez envie de mettre en avant en commentaire !

Le pense-bête du libraire

Genre/Fréquence : one shot en fantastique.
Autres titres notables de cet auteur (bibliographie complète en France) : 
- chez Actes Sud : La fleur de l'illusion (polar, 2016 ; 2018 en poche Babel) ; Les Doigts rouges (polar, 2018 ; 2020 en poche Babel).
Le pitch en une phrase : Une nuit, après un cambriolage, trois jeunes garçons trouvent à se cacher dans un vieux bazar abandonné, dans lequel ils vont découvrir et se livrer à une correspondance très étrange.
Ce qui peut piquer la curiosité du client : l'aspect mystérieux du bazar et des évènements qui ouvrent le récit, la diversité des points de vue et parcours qui s'entrecroisent et s'influencent ; l'auteur sait entretenir le désir de connaitre le fin mot de l'histoire.
Les atouts à mettre en avant : le fait que la trame soit très bien structurée, conçue comme un mystère à élucider, que la curiosité du lecteur soit entretenue jusqu'à la dernière page ; c'est une histoire agréable, facile à lire ; il peut être proposé à de jeunes lecteurs.
Les éventuels freins à l'intérêt du client : il n'y a pas vraiment d'action, pas de rebondissement, l'auteur n'a pas particulièrement cherché à chambouler son lecteur ; à certains, il pourra peut-être paraitre un tantinet moralisateur...
À qui je conseillerais : aux amateurs de fantastique, aux lecteurs qui ont envie d'une jolie lecture, tranquille, douce, pleine de bienveillance.

Commentaires